Revenir au creux de cette immense dimension,
fourchue, ébréchée, sensible
qui a vu naître l’humanité.
Imaginer les crètes de houle enneigées,
les montagnes couvertes de crabes,
le monde à l’envers de l’endroit.
Prendre le temps de loucher sur une coccinelle,
de marcher à cloche-pied,
se délecter des lumières d’automne.
Plutôt que se blottir dans des vestes synthétiques,
déconnectés du reste,
sous cloche.
Oublier l’harmonie du vivant,
pour déloger des familles
d’oiseaux migrateurs.
Constater le désastre,
sans remords,
en clignant des yeux.
Continuer d’enfermer,
des corps malades,
derrières des vitres teintées.
Reprenons le goût de la terre
écoutons jouir les insectes
émerveillons-nous devant le vol des hirondelles.
Tremblons tels des brins d’herbe
chassons comme des loups
fondons-nous dans la mosaïque corallienne.
Enivrons-nous du chant des cigales
des fausses notes en vert
des silences en bleu.
Retrouvons l’enthousiasme
de l’existence du vivant
et la joie d’en faire partie.
Arrêtons d’hésiter
entre des pièces dorées
et le maintien de la vie.
Observons les plumes qui naissent sous nos bras
les griffes qui jaillissent de nos doigts
la sève le long de notre colonne vertébrale.
Regardons la crête de nos oreilles
ornées de jeunes pinceaux noirs
héritage innomé d’un lynx altruiste.
Réapprenons ensemble
la mélodie des saisons
théâtres du spectacle vivant.
Alors,
le doux fluide de notre animalité,
source de vie,
Viendra lécher nos orteils devenus fleurs,
le temps du réensauvagement
d’une humanité heureuse.
Charlotte Guiet
Je suis convaincue que l'une des causes principales du manque d'engagement des personnes vis à vis de la crise de la biodiversité et du changement climatique vient d'un manque profond de sensibilité au vivant. Pour la plupart, nous ne nous réjouissons que très peu de l'existence du vivant, ni de la chance que nous avons d'en faire partie. Notre culture occidentale sépare l'humain du reste, la "nature", nous menant à une posture extérieure à celle-ci. Ainsi, nous n'arrivons plus à ressentir des émotions, ni à imaginer d'autres relations avec les non-humains. Ce texte tente de redonner la joie au lecteur d'être vivant, et l'invite à se "réensauvager" via une attention particulière pour le monde qui l'entoure.
J'ai créé cette œuvre à partir de différents textes poétiques que j'avais déjà écrit pendant des balades en montagne. Je l'ai construit en deux partie ; la première écrite à l’infinitif pose un constat tandis que la seconde invite le lecteur à se mobiliser, s'engager, se métamorphoser. Ce poème s'inscrit dans l'univers du sensible. Le but était d'alterner entre des images fortes et concrètes, puis d'autres concepts plus flous qui laissent place à l'imaginaire.
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