Demain

Laurette HALGAND

Texte

EDUCATION
CITIES
CONSUMPTION
PEACE

L'oeuvre

Que la neige était belle, mes plus beaux souvenirs s’y rattachent. Des paysages immaculés, un soleil qui reste froid. Je profitais de l’air glacé qui faisait rougir mon nez, le soleil me réchauffait timidement le visage et la neige restait là, intacte. Vous voyez le déluge dehors ? La pluie est dense et violente, inondant chaque sol dans un fracas incessant, faisant de nous aujourd’hui, des matelots de chaque instant. La neige était tout l’opposé. Elle était légère, silencieuse, et réconfortante. C’était magique de la voir s’écouler du ciel et se poser doucement au sol.

Nous avons peut-être perdu cette neige mais nous avons gagné de nouvelles solidarités. Regardez par exemple, le plan canicule est systématisé et c’est un dispositif désormais compris par tous, décliné par toutes les collectivités, entreprises et qui protègent les populations les plus fragiles. Avant, les déchets alimentaires étaient jetés dans la poubelle commune et brûlés. Ces restes ont la plus grande des utilités, et vous le savez. Aujourd’hui, nous les compostons naturellement, mais il y a 7 ans, nous étions loin de tous avoir ce réflexe. Regardez comment vous réagissez, oui, cela vous semble inconcevable. On vous a appris à l’école tout le contraire, que justement les déchets alimentaires ne sont pas des déchets. C’est parce que l’école a été profondément transformée, on n’enseigne plus comme on enseignait, ni dans les contenus, ni dans l’approche. Les professeurs des écoles, des collèges, des lycées, tous ont réappris leur métier avec bonheur. Ils ont retrouvé le sens de la transmission des valeurs, du savoir-être, davantage que des connaissances arbitraires. Il y aurait tant à dire sur les changements de notre société, mais je ne veux pas m’éparpiller.

Je compte sur vous mes enfants, tout va bien, simplement la vie change. J’ai confiance en notre Terre et j’ai confiance en vous. Gardez toujours ça à l’esprit, la confiance ne doit pas se perdre. Sans confiance, comment pouvons-nous avancer ? Nous avons besoin d’évoluer sans crainte, sans méfiance, sans jugement et de partager le même but en toute transparence.

Nous sommes tous mobilisés à notre échelle et c’est par là que le changement a commencé. Il y a 7 ans vous naissiez, en même temps que les premiers agissements concrets pour l’environnement. Vous êtes dans les premiers mois de l’âge de raison et je comprends toutes vos interrogations. Restez curieux et critiques, la vérité est à construire autant qu’à découvrir. La superstition parle souvent de 7 ans de malheur, mais avec vous ça n’a été que du bonheur. Je vous ai vu grandir en même temps que le monde. Nous avions touché le fond : guerres, spéculations financières, toxicité des réseaux sociaux, censure sociale… Depuis, nous avons agi, de plus en plus nombreux, de plus en plus fort. Les États ont joué leur part, accélérant les actions. Le monde a pris un tournant. Fini la géopolitique bipolaire. Animaux, Recyclage, Équité, Libertés, Océan, Religions, Démocratie, et j’en passe. Tout fut reconsidéré. Nous ne cesserons pas de répéter sous une nouvelle forme les débats du passé. Mais depuis 7 ans, la plus grande réussite fut celle de l’unanimité. L’humanité s’est mise d’accord pour agir. Il y a 7 ans certains prônaient la pensée de ne pas procréer. Pour moi, ce n’était pas la solution ni même un moyen efficace. Vous en êtes la preuve. En 7 ans je vous ai vu devenir des enfants curieux, heureux, optimistes, brillants. Nous construirons ensemble une Terre habitable pour l’homme.

Faire les choses dans l’urgence nous a fait commettre des erreurs. Mais sans urgence, nous n'aurions rien fait. Autrefois les anciens contaient des histoires et la sagesse du passé. Aujourd'hui je suis là pour vous dire que ce passé n’a pas toujours été infaillible. Ne vous y attardez pas trop. Il y a toujours eu des génies mais aussi des imbéciles. La sagesse n'appartient pas à un temps. Elle est à trouver, non pas à imiter. Partout créons la confiance, prenons le temps, même s’il nous manque et continuons de construire sur ces fondations précieuses.


Le message

J'aimerais porter un message d'espoir avant tout, en l'humanité surtout. Il s'agit là de montrer que certes, le monde de 2030 et même après sera différent, mais qu'il faut l'accepter et avancer. C'est l'idée d'acceptation de notre situation et de ce qu'on en fait. J'aimerais pousser à agir, et à diffuser la confiance. En second plan, c'est l'idée des successions des générations et de la descendance que je soulève. Je cherche à montrer que ce qui nous rend vivant et nous fait apprécier la vie, c'est aussi les enfants d'une certaine façon. Nous construisons un monde vivable pour le vivant de demain. C'est aussi un message pour faire apprécier les choses de la nature que nous avons déjà, et que nous pourrions perdre. J'aimerais que chacun puisse réaliser cette richesse que nous avons entre les mains en la Terre et que nous la défendions tous à notre échelle.


Le processus créatif

J'ai écrit pendant qu'il neigeait, dans le mois de décembre, à Strasbourg. Et cette neige qui se fait de plus en plus rare, j'ai voulu l'immortaliser quelque part. De là est partie mon idée d'écrire un monde sans neige, un monde en 2030 avec pour autant plein de changements effectués (notamment institutionnels, sociétaux). Au départ j'imaginais une grand-mère, sage, qui récitait la vie d'autrefois à ses petits-enfants. Mais 2030 n'est pas si loin, alors j'ai recadré et j'ai aimé choisir le fait que ces enfants qui écoutent sont nés l'année où j'ai écrit ce récit. Par ailleurs, en chacun de nous réside encore un enfant intérieur, et c'est à lui que je m'adresse, le lecteur est comme ces enfants, à l'écoute et réagit à mes mots.