L'œuvre évoque l'état de plénitude que l'océan impose à celles et ceux qui le contemple. Là, toute illusion de contrôle humain s'effondre face à une force souveraine et indifférente. L'océan n'a que faire des identités, des genres ou des constructions humaines : il réduit femmes et hommes à de simples corps, fragments d'un tout, emportés par une matrice primordiale. Dans cet univers, l'esprit divague, perdu dans un équilibre si parfait qu'il en devient irréel. Le rêve prend le pas sur la réalité, brouillant leurs frontières: où finit le monde tangible, où commence l'affabulation de l'esprit ? Sirènes, monstres industriels, pirates et créatures fantastiques se mêlent pour tisser un théâtre d'une poésie brute. Mais bientôt, la nature reprend ses droits. Ce rêve liquide, à la fois terrifiant et sublime, rappelle à l'Homme qu'il n'est qu'une poussière face à une immensité qui l'engloutit, le transcende et l'absorbe dans une harmonie indomptable.
J'ai vécu à bord du Scylla, navire engagé contre la pollution maritime avec l'asso Wings of the Ocean. Entre opérations de dépollution et ateliers de sensibilisation, il restait des instants de vide, propices à la contemplation. Malgré les mégots, les plastiques, et ces intrusions humaines déversées dans l'océan, une pensée m'habitait : la nature surpassera toujours nos prétentions. Son ordre est supérieur, et tôt ou tard, nos déséquilibres finiront par se renverser. C'est dans cette réflexion que j'ai entrepris cette fresque : un dialogue entre les déchets et les abysses, comme si l'océan avalait nos dérives pour mieux nous renvoyer à notre insignifiance.
Puis vint le temps des quarts, ces moments où, jour et nuit, nous nous relayons pour guider le bateau. Là, la nature impose ses lois. Nous n'existons qu'en réaction à elle. Un jour, je tombai sur les mots de Catherine Poulain dans un magazine de bord. Abasourdie par cette femme, j'ai intégré ses mots à ma création.
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