Sillages d’un sommeil éveillé

Charlotte

Texte

PHEALTHoverty
EARTH_LIFE

L'oeuvre

Il y a des rêves qui nous embarquent, nous font flotter le temps d’une nuit. Des rêves semblables aux vagues que l’horizon écrit et dont les tempêtes façonnent l’intrigue.
Il y a des rêves qui rugissent en silence, qui sans crier font du bruit, des rêves qui brûlent de l’intérieur, sans sortir de la pièce. Ceux-là même dont la fuite est immobile, quand le corps hurle mais que chaque mouvement fait prisonnier.

Il y a des rêves trop pleins et des rêves faits de vide. Un vide que les cœurs vifs connaissent, embarqués en plein vol dans une chute infinie.

Il y a les rêves trop courts, les rêves trop longs. Les rêves que l’on voudrait prolonger et ceux qui nous ont étouffés. Les rêves qui n’ont pas repris quand on s’est rendormi, et ceux que l’on raccourcit, pour rendre la nuit moins longue.

Il y a les rêves qui dépassent les pensées, ceux qui nous font parler lorsque les corps somnolent.

Il y a les rêves qui nous maitrisent et ceux que l’on veut construire soi-même.

Il y a ceux que l’on contemple du dessus, du coin de l’œil, que l’on vit en dehors, ou plutôt en dedans. Les rêves que l’on ne comprend pas et qui rendent nos âmes amères. Et il y a ceux qui élèvent, que l’esprit fait naitre et qu’un seul souffle éveille, nous, créatures vibrantes.

Il y a des rêves que l’on espère être des songes, et ceux qui n’inspirent rien de bon. Les rêves qui marquent au delà des draps, ceux dont les traces blessent le cœur et dont le corps porte l’empreinte. Il y a ceux qui rouvrent des plaies endormies, que même le déni dans l’éveil ne peut panser.

Il y a des rêves brûlants, ceux qui naissent du mouvement, de cette ardeur charnelle et des instants vivants. Les rêves que l’on ne s’autorise qu’à rêver, que la curiosité implore, les rêves que l’on cherche à franchir au lieu de s’interdire.

Il y a les rêves que l’on aurait aimé penser, ceux là même que l’artiste, le maître, peine à écrire et que l’élève, inconscient, dépasse.

Il y a les rêves qui sont assez lointains pour nous laisser mourir, mourir à la réalité pour plonger dans ce qui ne nous touchera jamais pleinement. La mort de la réalité terrestre pour vivre au dessus de soi, dans cet espace lunaire que seuls les étourdis savent vivre, déjà.


Le message

"Sillages d'un sommeil éveillé" est une exploration poétique de cet état fragile que le rêve peut nous faire vivre. Je cherchais à décrire ce voyage intérieur mais avant tout subjectif, où l'esprit se perd à la frontière du réel et de l'imaginaire.
Le poème est une invitation à ressentir cette étrange liberté qui naît quand le rêve prend forme, comme un monde parallèle que l’on effleure sans jamais vraiment y pénétrer.
J’avais envie de souligner la subtilité de l'expérience du rêve qui permet d'apprécier les moments où l'esprit se libère des contraintes, où la fiction et la conscience se mélangent pour offrir des visions surprenantes de nos vies le temps d’une nuit.
À travers cette frontière floue entre veille et sommeil, on réalise que la réalité n'est pas simplement ce que l'on perçoit, mais aussi ce que l'on ressent, ce que l'on imagine. C'est une invitation à interpréter et à explorer les territoires invisibles de l'âme et de l'esprit.


Le processus créatif

Ce poème illustre le rêve comme une frontière entre inconscience et conscience, elle-même terrain fertile pour la création artistique. Un état de rêverie éveillée, où les idées et les émotions émergent à la fois de la lucidité et de l’irréel.
Je souhaitais exprimer cette idée que l'inspiration artistique ne vient pas toujours d'une pensée consciente ou d'une volonté de créer, mais parfois d'un état flottant, presque onirique, où l’esprit capte des sensations et des images parfois insoupçonnées. Le rêve prend forme pour dévoiler des vérités personnelles, voire universelles, mais dont le sens reste parfois inaccessible.
Cela nous invite à percevoir la création artistique comme ces émotions profondes qui nous échappent. Ces "sillages" laissés par l'invisible, parfois impalpables mais essentiels pour donner naissance à une œuvre.